dimanche 29 novembre 2009

Wild and Wonderful

Plus ca vient, plus je me dis qu’il y a un air d’Amérique a Agde. Ou un air d’Agde dans l’Amérique, je ne sais plus trop. Mais pour Agde, il s'agit de singerie, c'est une maison de poupées. C'est une Amérique qui n'aurait pas les moyens. Ils en ont rêvé, mais obviously, ils ont rate les USA. C'est de l'ordre du guignol et du Platon, toujours ces fantômes qu'on poursuit. Agde vit dans une mythologie qui ne lui appartient pas. La téloche y a propulsé un peu de rêve, du genre cathodique, en bombardement. Pas de différence entre les avions de l'US Air Force sur les villages normands et les séries télés : les Etats-Unis ont donné dans le massif, le colossal, et ont colle un rêve en Placoplatre sur la culture creuse des nouveaux petits-bourgeois.

Le plus parfaitement symptomatique : Hyper U et tout le bordel alentour. Ca, c'est du mall en carton pâte, précisément une copie, un simulacre. Le mall a qui l'on aurait ôté toute sa puissance hallucinatoire, sa capacité d'attraction magnétique, pour n'obtenir au bout du compte qu'un quelconque centre commercial, qui révèle au grand jour la dialectique de l'ordinaire et du spécial. Et parce que sous une forme ou un autre on y a injecte un peu de "notre civilisation", en vérité nous n'avons fait que le purger de sa grande spécificité, c'est à dire la grande machinerie, quelque peu trash, totalement absurde de la société de consommation. Nos esprits pascaliens ne savent pas quoi faire du Vide, alors nous le remplissons. A l'inverse, les américains ont compris comment faire du non-sens un sens, et comment la vacuité existe par elle-même. Je veux dire, per se. Le paradoxe est simple : Agde cherchant à faire une chose spéciale, la rend au final tout a fait ordinaire, banale et inutile ; c'est en forçant sur l'ordinaire que l'Amérique développe son potentiel d’extraordinaire.

Et ca marche en demi-teinte. Les agathois sont comme des mouches qui vont voler un peu sur la confiture (sauf qu'ils vont à Hyper U en voiture), comme si elles ignoraient que leurs rêves étaient peuples de charogne, de fiente et d'ordure. Au fond, nous n'avons pas la puissance de la fatuité, la grande énergie de l'Absurde. Tous nos problèmes existentiels viennent de ce que nous créons encore des concepts. C'est que Camus a écrit des livres pour nous. Mais les américains n'ont jamais eu besoin de ses concepts, parce qu'ils les avaient déjà compris plus avant, d'ou que de Sisyphe, et plus encore de Blaise Pascal, ils n’ont rien à faire.

On a plagié les modes de vie aussi. Les petites boites, les voitures, toute l'énergie optimiste de l'individualité. Là encore en vain, puisque notre foi en le Néant n'est pas assez grande pour y consacrer l'énergie suffisante. Quelle abnégation faut-il pour créer ces systèmes fondes sur rien et qui n'accouchent que d'eux-mêmes. Voila le pays de Stirner dans le mesure ou il n'a fonde sa cause sur Rien. It doesn't make sense ; ça ne fait pas sens. Le biglotron américain ne sert qu'a produire et reproduire des engeances toujours plus folles et plus monstrueuses, comme ces gratte-ciels qui ont pousse et poussent encore dans les CBD, et dont on croirait qu'ils s'engendrent les uns les autres, comme une mitose, comme un cancer. Mais Agde se cantonne au médiocre, de peur d'y céder totalement. Il n'y a plus que l'énergie du désespoir qui pourrait la plonger (enfin complètement) dans l'hystérie et le capitalisme.

C'est un problème de culture. Nous voulons voir l'Histoire comme une marche, un processus, une vague. Mais tôt ou tard les vagues meurent sur la plage, et de proche en proche nous ne sommes plus que dans la sauvegarde, la compilation, l'archivage, le bouillonnement et le ressassement des données de notre passé. Je ne dis pas que l'Amérique n'a pas de culture. Au contraire. Mais la grande différence réside dans le fait que chaque année, peut-être même chaque minute, tous les compteurs sont remis a zéro. Ils effacent l'Histoire au fur et a mesure qu'ils l'écrivent. C'est de ce pouvoir autodestructeur que nait également son pouvoir générateur. Sur ce plan en effet, après Guy Debord je dis : "Paris n'existe plus", dans la mesure ou l'Europe n'a plus la chance des créer des mythes a cent a l'heure, je veux dire ses propres mythes, des mythes ou se faire une drôle de niche, un coin dans l'existence, une niche proactive. La différence entre nos mythes et les leurs, c'est que les nôtres ne sont pas aléatoires. Nous avons Vercingétorix, Napoléon, Paris, Descartes, Sartre et de Gaulle. Autant dire qu'il y a 50% de fantasme et 50% de sueur dans ce que nous avons fait de mythique. L'Amérique a New York, Elvis, sa Constitution, Kennedy une balle dans la tète uniquement, ses neighborhoods, ses flingues et ses grosses bagnoles. En somme, rien que du spontané, 100% de chaos dont émerge 100% de mythes. Notre cinéma veut influencer nos vies ; le leur n'en est que le reflet, l'hologramme. L'Amérique a ceci de grandiose et de désespérant qu'ils ont invente le plus vif de tous les mythes : le mythe de la banalité.

La preuve, c'est Vegas, qui est comme un temple dédie au culte de l'absurdité, au milieu du désert. Il y a comme une charge d'ironie dans les répliques en polystyrène de Gizeh et de la Tour Eiffel. Certes n'y a-t-il rien d'authentique, mais c'est dans cette plastique creuse que nait l'authenticité américaine elle-même, celle que nous avons perdu le jour où l’on a voulu construire nos Phenix et poser nos parpaings couleur de mauvais ocre. Parce que cette esthétique du Non-Sens, au final, ne nous appartenait pas. L'Amérique a fait de ses mythes sa nourriture, tant et si bien qu’à Vegas, c'est l'eau qui est arrivée en dernier. Ce n'est pas sans effort. C'est ce qu'il y a de beau et de profondément désespérant dans ce pays. Eux seuls les ont trouvés, les architectes pour leur construire des maisons sans pièces et les urbanistes pour leur dessiner des chemins pour nulle part, et les temples ou l'on ne prie pour rien.

PS: Le lecteur me pardonnera quelques accents oublies pour cause de clavier qwerty.

Egalement sur : http://onauradufric.canalblog.com/

vendredi 27 novembre 2009

Alain Corbinien malgré lui

Ce matin j'ai cru entendre des cloches tinter.
Ca a déclenché un maelstrom de souvenirs : les matinées de week-end enfermés dans nos lits le matin en attendant 9h pour se lever, avec les cloches qui chantaient les Laudes à Prunay, ou le chuchotement de celles de Mailly, quand tout était silencieux dans la maison et que leur son étouffé me parvenait à travers les velux du grenier, et aussi quand j'allais m'accouder aux fenêtres pour regarder la forêt blanchie par le brouillard au début de l'hiver, et qu'elles me parvenaient bien plus caires - je pouvais même les voir - ou encore cette fois où j'ai bossé un exposé chez Ryan l'Américaine à Paris, dans son appart' sur l'île de la Cité où l'on voyait Notre-Dame depuis sa fenêtre et que lorsque les cloches ont sonné son cousin qui était là a dit "C'est quoi ce bordel ?" en les entendant.
C'est fou comme je ne m'étais pas aperçu qu'il n'y a pas de cloches ici. Et c'est fou comme ça fait partie de moi. Ca me manque presque énormément. Et pourtant ça fait partie d'une institution qui n'est pas du tout moi. Mais c'est moi quand même.
Mais le mieux, c'était ce sentiment doux-amer, amer pour la déception et doux pour l'ironie que ce n'était qu'un ersatz, lorsque je me suis rendu qu'en fait ce son n'était qu'une sirène d'ambulance qui résonnait parfaitement en même temps que Saint Rose of Lima, sur l'album Confines of Heart par The Mercury Program et Maserati. (Il était très tôt donc la musique n'était pas fort du tout, et l'ambulance était loin, ça explique que je n'entendais que ces deux pointes sonores, comme des cloches).

jeudi 12 novembre 2009

Providence

Haha t'es géniale Juju :-)
T'as pensé à mettre du désinfectant avec les pansements, dans ma trousse de secours !
Je reviens d'un "futsal" (à la russe : c'est Alexei qui organisait) soit un foot en salle, avec 12 autre étudiants (10 pays différents en tout ; 3 Chinois). C'était vachement sympa sauf que j'ai marché sur la balle dans une héroïque action défensive et je me suis ruiné la cheville, et en tombant ma main a tout pris sur ce sol en sorte de nid d'abeille complètement merdique, donc ma paume fait la tronche. Et en prenant ma douche, j'ai vu que mes baskets n'étaient vraiment pas adaptées pour le foot vu que j'avais des lambeaux de peau qui s'en allaient. D'où le désinfectant et les pansements.
Après ces croustillants détails, un peu de glamour.
Mmmmh... Bon, j'essaie d'apprendre un peu de coréen et de chinois (notamment je connais une insulte vachement sympa en chinois, mais pour compenser j'ai appris comment dire "Hey mec" et "Salut jolie toi"). Et je me remets vaguement au russe et au castillan aussi, avec Alexei (qui m'apprend plein de trucs dégueulasses) et Valentina qui ne parle pas des masses japonais alors on fait un mix anglais-japonais-russe. Le castillan, c'est David le Colombien avec qui j'espère pouvoir discuter à nouveau ; je le reverrai au plus tard la semaine prochaine : je retournerai au foot si ma cheville me le permet ! Donc volley avec des Japonais le lundi, foot international le jeudi et beuverie HUSTEPienne le vendredi à Keitaki. Tout baigne toujours :-) Là il est minuit, je fais mon japonais et je vais me pieuter.
Ah ouais, une autre anecdote : là en rentrant du foot je n'avais pas froid dans ma chambre. Je suis direct allé prendre ma douche et en y revenant, toujours pas froid. Il faisait 12°C. Je suis en train de devenir un monstre. Ah oui, et comme j'en ai ma claque de bouffer des nouilles, je me mets à cuisiner un peu. Oh nom de Zeus, je me fais des pots-pourris d'un peu tout ce que j'ai et sérieux, je dois avoir une sacrée chance parce que c'est vachement bon ! Exemple : j'achète un steak et un poireau ainsi qu'une banane. Donc je me remodèle le steak que je fais cuire dans du beurre et sur lequel je rajoute de l'huile d'olive et du sel - je vide le jus au fur et à mesure une fois qu'il a macéré un peu. Bah c'était bon. Le poireau, je le fais fondre dans du lait, du beurre et de l'huile d'olive salés au départ, puis idem je vide. Je crois qu'à la fin j'ai mis une touche de miel pour voir. Super bon. Et en même temps, j'ai coupé la banane et l'ai faite cuire avec du miel. Bin le tout ensemble nan sérieux sans charrier, c'était succulent. 'fin bon, je vous laisse je vais m'occuper de panser mes blessures et de mon japonais !

おやすみ! (Ca veut dire bonne nuit : oyasumi)

mardi 3 novembre 2009

Tropiques les bienheureuses.

10 000 kilomètres, plus quelques mètres. Éloigné du béton et du macadam, j'échappe pas trop à ses tracasseries. Mouais, parfois j'ai envie de pleurer, c'est à gerber. Les aubes sont navrantes, là-bas. On cherche à être français, outre-atlantique, et moi je cherche à ne pas l'être.

1er verset des béatitudes:
J'me dis, maintenant que chacun des pantins faux-culs a dégueulé son hommage à un mec dont ils savaient bien qu'il fallait lui faire une p'tite léchouille post-mortem, que j'lui dois, moi, un constat. Les tropiques ont séché leures larmes, bonhomme! Ici, les gens sont heureux. Heureux de pas s'prendre la tête pour des conneries. Heureux de n'en avoir rien à foutre des charognards bouffis qui ont la prétention de tout décider à leur place. Heureux de n'pas être emmerdés à chaque fois qu'ils se tordent dans les boyaux vibrants de la ville. Heureux d'être ensembles. Heureux de saper le malheur aux plaies béantes, cracher sur ce salaire minimum à 1000 pesos - 1,25€. En fait, heureux d'être.

Ici, la meuf dans la rue, tu lui tapes dans la main; le mec à la rue aussi. C'est pas eux qui te tapent dans l'oeil. C'est pareil chez vous ?

Moi, la désolation me désole. J'l'entrevois bien, avec ma longue-vue et mon zoom optique. Et j'la comprends aussi. J'vois ce Guernica plâtré, et j'me dis qu'aujourd'hui y'a des tables à renverser, des trucs à oublier et apprendre, des figements et des liasses à ba-zarder. Un tango ?

Mais mon dieu Monsieur, c'pas les tropiques qui sont tristes.